jeudi 8 novembre 2012

Secrets

       Dans la vie de chaque être humain, il existe des zones d’ombre, des choses que l’on n’a pas envie de s'avouer. Des idées qui demeurent à l’état de fantasme. Des pulsions à l'encontre desquels on passe sa vie à lutter. Ces choses dont on aimerait parler, mais on ne sait pas vraiment à qui. Tout le monde ne saute pas le pas de l’analyse par un professionnel. C’est souvent coûteux, et les freins moraux et sociaux sont encore trop forts en France. Alors on vit chaque jour en transportant une bombe à retardement sur soi. On sait qu’elle est là, mais on essaye de l’oublier. Au risque de se perde de vue pour mieux se conformer à un idéal accepté. « Ça va passer si je pense à autre chose ».

Malheureusement je suis un type plutôt lucide et il m'est impossible d'éluder ces aspects de ma personnalité plus longtemps. Pour certains, des années de psychanalyse sont nécessaires ne serait-ce que pour approcher de loin le sujet. Plus que de la lucidité, c'est un état de communion parfaite avec moi-même. Une relation très simple que nous entretenons mon MOI, mon CA, et mon SURMOI. On discute. On se raconte tout. Nous n'avons aucun secret les un pour les autres. Si vous ne reteniez que ça de moi, vous pourriez penser que je suis l’homme le plus sain et équilibré du monde. Je me demande.

         Les gens mettent une vie entière à découvrir qui ils sont vraiment et c'est sûrement tant mieux pour eux. Moi je le sais. Je connais les moindres déviants secrets de mon esprit. Je vis tous les jours avec mes démons, mes peurs, mes perversions, mes secrets. Car si en effet, je n'ai aucun secret pour ma propre personne, les choses que je sais de moi se doivent de rester cachées aux yeux du monde. Et si un jour, je devais tout déballer, ce serai la grande explosion des liens sociaux que j'ai mis si longtemps à tisser. Si seulement ils savaient…S'ils savaient quel plaisir malsain j'éprouve à regarder ces petits chatons se noyer dans ma baignoire. Le frisson exquis d’un scalpel qui s’enfonce dans la chair d’un animal encore chaud. S’ils savaient, ils devineraient sans peine les pulsions bien plus morbides qui m'habitent et contre lesquels je dois chaque jour un peu plus lutter.
        Disséquer de petits être dénués du don de la parole n'a plus aucun intérêt à mes yeux. J'aimerais tellement savoir ce que ça fait de voir un homme ou une femme hurler à mort. Se débattre, la peur dans les yeux. Le corps agité de spasmes. Les organes internes qui palpitent, bien loin de la chaleur du corps auquel je les auraient extirpés. Mon sexe tendu qui s'enfoncerait dans leurs entrailles à vif. Leurs pupilles qui se révulseraient, le sang et la salive mêlées, mes doigts s’enfonçant lentement dans leur cerveau à nu. Ces désirs m’habitent et je ne peux les empêcher d’exister. Je suis ainsi fait. La seule chose qui est encore en mon pouvoir, c’est de les empêcher de devenir réalité. Et c’est en partie pour cette raison que je vous raconte tout ça, anonymement. Pour me délester de ce fardeau horrible, cette sensation qu'un jour je pourrais basculer dans la folie. Un jour  je le mettrai dans votre verre ce cachet de GHB que je garde précieusement dans ma poche de jean. Combien de temps vais-je encore pouvoir tenir mon déguisement d’être humain, moi qui suis loup. Un jour je finirai par passer à l'action. Je ne serai plus capable de lutter contre moi-même. Je céderai enfin à ces pulsions qui me hantent pour ne plus jamais être le même...


Poisson d'avril! Ah mince, on est pas en avril. Alors JOYEUX HALLOWEEN!!!
Ce petit texte sera ma contribution en retard à cette fête de la frousse. J’espère que vous vous sentez très mal à l’aise, et que vous avez eu momentanément très très TRES peur de me rencontrer en vrai. Auquel cas, je mériterais quelques bonbons tout de même ^___^. En vrai je suis un gentil pipou, mais Stephen King et Bret Easton Ellis ont une très mauvaise influence sur moi en ce moment.
Encore désolé de déserter le blog de la sorte, mais j’ai beaucoup de projets d’écriture qui me tiennent à cœur en ce moment et j’ai décidé de leur donner la priorité. Mais quand l’envie me prendra de venir écrire n’importe quoi pour me défouler, je serai content de vous retrouver.
Des bisous à tous et encore Joyeux Halloween en retard!


vendredi 28 septembre 2012

Instant Girlfriend

Est-ce que tu voudrais être mon amoureuse, le temps d'un trajet?
Tu as l'air lasse toi aussi. Dure journée? Moi aussi.
Tu regardes les câbles défiler par la fenêtre du métro et tu soupires.
Si tu veux, je peux passer mon bras autour de tes épaules. On serait bien comme ça non?
Tu me raconterais ta journée. Je te dirais la mienne. L'espace de quelques stations nous pourrions trouver le réconfort dont nous avons besoin.
Rapproche-toi. Viens plus près. 
Tu te blottirais tout contre moi, et pendant un moment j'oublierais tout.
Découvrir ton parfum, caresser tes cheveux. Peut-être poser un baiser sur ton front.
C'est ta station? Au revoir. C'était très agréable. Et nos vies reprendraient, un peu moins tristes.
J'aimerais parfois que les relations humaines soient plus simples, plus spontanées, plus honnêtes.
Mais tu regardes le paysage, le regard vide, l'esprit ailleurs; et jamais tu ne sauras que l'espace de quelques instants, nous aurions pu partager tant d'intimité, de chaleur.
C'est ma station.
Je cherche désespérément à croiser ton regard, au moins une fois avant de partir. Mais c'est peine perdue.
Tant pis.
Peut-être est-ce moi qui manque de spontanéité? Le vide en moi s'agrandit chaque jour un peu plus.
Ce soir encore, je rentre seul vers un appartement froid.

dimanche 16 septembre 2012

This is the End - Episode 4.5

Je vais reprendre l'écriture de cette histoire débile de fin du monde sur fond de marques de pub. Pour ceux qui ne l'ont jamais lu, il y a de la violence, des combats, du WTF, et bientôt je l'espère du sexe trans-genre alors je vous engage sérieusement à les lire dans l'ordre. Voici les liens des premiers épisodes:

Episode 1: ICI

Episode 2: ICI

Episode 3: ICI

Episode 3.5: ICI

Episode 4: ICI



Pour ceux qui sont à jour, bonne lecture!





On a trop souvent tendance à croire que l’être humain est une chose fragile. Qu’un souffle de vent suffit à nous enrhumer. Une marche ratée, une chute, et c’est un bras cassé. Pourtant l’être humain est une machine étonnamment résistante, aux mécanismes complexes, voire parfois incompréhensibles. Il est des fois où la puissance mystérieuse du corps humain se manifeste de façon déconcertante.



Benjamin donc, déambule d’une démarche aléatoire dans les rues de la Défense. Costume noir, chemise blanche, cravate fine, le tout constellé de tâches de sang. Une balle de gros calibre a traversé sa tête de part en part sans pour autant le tuer. Une aberration médicale. Un miracle. A l’avant de son crâne, en plein milieu du front, se trouve un trou de la taille d’un poing d’où a giclé un bon tiers de son cerveau. C’est d’ailleurs la première chose qu’il a aperçut en se réveillant, les petits morceaux rosés de son cerveau éparpillés dans une flaque luisante aux reflets écarlates. « Ça ressemble à du vomi » s’était-il alors dit en souriant. Mais rapidement, la sensation étrange qu’un courant d’air lui traversait la tête de part en part lui révéla la nature de la flaque dégoulinant dans les escaliers menant aux sous-sols de La Défense.



Benjamin avance donc, le pas hésitant, affaibli par une belle perte de sang. Plus que la faim et le froid qui le tenaillent, il ressent une angoisse grandissante de perdre le reste de sa manière grise. Ainsi, il progresse les deux mains plaquées au milieu du front, contre son nouveau trou de balle. Ses doigts sont poisseux du sang qui a coagulé et des restes de liquide encéphalique. La rue est déserte. Le bruit des coups de feu et les informations sur la fusillade ont cloîtrés les locaux chez eux. De temps à autre, Benjamin surprend du coin de sa vision trouble des paires d’yeux qui l’observent. Depuis leur balcon, derrière leurs rideaux. « Bande de baltringues ! leur hurle-t-il. Ça vous raclerait l’anus d’appeler une ambulance non ? » Immédiatement les curieux disparaissent, laissant Ben, vagabonder seul dans les rues.



Il ne sait plus vraiment pourquoi il marche. Il marche pour s’éloigner du AK47 de Croustibat, il marche pour échapper aux fusils snipers de Cétélem. Il marche vers où, il ne sait pas. Soudain, il s’immobilise et se retourne prudemment vers la vitrine du magasin qu’il vient de dépasser. « Mais c’est ça qu’on veut ! » s’exclame-t-il si fort qu’il sent les restes de son cerveau gigoter dans sa boîte crânienne. Les yeux comme deux grosses billes, il scrute les casques dans la boutique de 2 roues. Le magasin est ouvert, sans plus attendre, il se précipite à l’intérieur accompagné par le carillon électronique de la boutique. Il en ressort dix minutes plus tard avec un casque noir intégral, rutilant, qui prolonge élégamment son costume de la même couleur. Le patron, tout d’abord terrifié à la vue du trou béant s’était montré très prévenant avec lui dès l’instant où Benjamin avait sorti une belle liasse de billet comme preuve de bonne foi. Il lui avait même fourni une boîte de compresses et du désinfectant qu’il était allé chercher dans son armoire à pharmacie personnelle. Un bon commerçant vraiment. Soulagé de savoir son cerveau plus à l’abri que jamais, il se remet en route, cette fois avec un but bien précis : manger. Tout sourire derrière sa visière fumée, il essaye d’envoyer un montage photo sur Instagram où on le voit, hilare avec son trou dans la tête puis défait sans son nouvel opercule, sous titré sobrement « Nekotrou/Nekotriste ». Mais il n’y a pas de réseau et c’est à contre-cœur qu’il doit abandonner l’envoi de son chef d’œuvre.



Après plusieurs minutes de marche le long de la plus grosse rue qu’il ait trouvée, Ben rejoint enfin le commerce qu’il recherchait désespérément. «Délice Kebab » le nom sonne comme une prophétie à ses oreilles et c’est le cœur léger qu’il pénètre dans l’établissement. S’accoudant nonchalamment au comptoir sans même relever sa visière teintée, il interpelle l’unique employé. « Bien ou Bien ? » Le type qui s’affairait à découper le gros morceau de viande en révolution, se retourne interloqué par ce client extravagant. « Bien… » lui répond-il hésitant. « C’est bien t’as vu. » Benjamin en opine du casque et ponctue ses fins de phrases avec de grands gestes des mains. « Bah je voudrais un kebab frite t’as vu. Avec un supplément fromage et sauce algérienne s’teu plaît chef. » Le gérant est un peu décontenancé, mais poursuit comme si de rien n’était. « Salade-tomate-oignon ? » Pour seul réponse, Benjamin, hoche vigoureusement de la tête en montrant ses pouces. « Installez-vous alors. Je vous apporte votre commande quand c’est prêt. » Sans se faire prier, il s’exécute et va rejoindre une table à laquelle il s’installe. Pour passer le temps, il joue à Fruit Ninja, mais il ne voit pas grand-chose avec la visière teintée de son casque. Puis soudain, semblant se souvenir de quelque chose, il se redresse et relève sa visière. « Je me demande ce qu’elle est devenue la petite chinoise … ».

vendredi 10 août 2012

La femme et l'enfant

En voilà une bien jolie maman se dit Julien en rentrant dans la rame de métro. Sur le strapontin du fond, une jeune femme au charme discret se penche au-dessus d’une poussette, tout sourire. Pas de bijou, pas de maquillage, un simple chemisier léger et une jupe pastel. Très féminine. Quelque chose dans la douceur de son sourire, la grâce de ses mouvements. Il n’y a plus de places assises, Julien va s’adosser à la porte opposée du métro, entre les strapontins. D’ici il pourra observer le bambin et sa jolie maman. Il aime bien les bébés et cette façon candide qu’ils ont de sourire à n’importe quel inconnu en échange d’une simple grimace. 

Mais dans la poussette, il ne trouve qu’une poupée. Un bébé en plastique qui fixe le plafond avec des yeux bleus vitreux, une expression béate moulée à la chaîne dans une usine chinoise. Sa « mère » l’observe avec tendresse et caresse le plastique rosé de ses joues du revers de la main avant de jeter un coup d’œil discret à Julien. Elle est belle. Elle rayonne. Cette femme est folle à lier, mais elle irradie d’une beauté qui lui crève le cœur. Alors il lui rend son sourire et fait mine de s’intéresser au « bébé ». Il sourit au jouet et fait quelques signes de la main, comme pour attirer son attention. Il se trouve un peu idiot de jouer  à la poupée dans le seul but d’attirer l’attention de cette femme dérangée. Lui, un jeune homme si raisonnable d'habitude. Soudain, il réalise que la poupée le suit des yeux. Son sang se glace d’effroi. Le jouet plastique ne le quitte plus du regard, suivant le moindre de ses déplacements. Julien fait instinctivement quelques pas en arrière et vient buter dans la porte derrière lui. Les deux billes de plastique bleues ne perdent pas une miette du spectacle.
- "Allons, ne fixe pas le monsieur comme ça Elvis, ça ne se fait pas !" le gronde sévèrement sa mère en lui tapant violemment sur les doigts. La poupée ne bronche pas, les yeux toujours rivés sur lui. La femme se rapproche de Julien et pose sa main sur son avant-bras.
- "Excusez-le monsieur… Il n’est pas comme ça d’habitude. J’ai l’impression qu’il vous apprécie beaucoup." Sa voix est suave et chantante. Sa main est chaude, douce, rassurante. Le contact de leurs peaux se prolonge. Un peu trop longtemps pour de simples inconnus. Au bout d’un temps qui semble une éternité, elle laisse doucement glisser sa main sur son bras jusqu’à ce que leurs doigts se touchent. Les yeux verts de  la jeune maman sont plongés dans les siens. Le cœur du jeune homme bat fort, c’en est presque douloureux. Il est très mal à l’aise, mais cette femme remue quelque chose en lui qu’il ne comprend pas. Une sensualité féroce. Peut-être ses seins nus qu’il devine sous le tissu léger. Ses jambes finement galbées. La façon dont le tissu mou de sa jupe ne cesse de remonter sur ses cuisses. Il finit par craquer et détourne les yeux tandis que la femme retourne s’asseoir. Dans la rame, tout le monde le fixe. Des regards mauvais, inquisiteurs. Une sueur froide parcourt son échine. Il n’a rien demandé à personne, mais ce matin, le sort semble vouloir s’acharner contre lui. Le métro s’arrête. Buzenval. Personne ne rentre, personne ne sort. Encore une station et il pourra sortir de cette rame. La sonnerie retentit et le métro repart. Fermant les yeux, il prend une longue inspiration. Plus qu'une station…

Lorsqu’il ouvre à nouveau les yeux, le baigneur en plastique est toujours là, à le fixer. Une poupée grossière à la peau rosée, une petite bouche perpétuellement entrouverte dans un rictus malsain. Impossible que ces yeux le suivent réellement. Il doit être trop fatigué. Il s'imagine des choses. Mais quand le jouet tente de jaillir hors de son lit, Julien manque de hurler. Son dos vient heurter violemment la porte du métro. Le bébé se met à mouliner furieusement des bras et des jambes dans un chuintement plastique. Les sangles de la poussette le retiennent. Sa petite bouche continue de sourire, ses yeux ne lâchent pas leur cible. Aucun son ne s’échappe de lui. La chose se débat frénétiquement, battant des pieds et des mains dans tous les sens dans un silence de mort. Dans la rame, personne ne semble rien remarquer d’inhabituel. Chacun lit son journal, écoute de la musique, regarde les parois défiler. Les gens agissent comme si de rien n’était.
- "Alors tu as faim mon petit ?" demande la jeune femme depuis son strapontin.
- "Maman va te donner à manger." Lentement, elle déboutonne son chemisier. Le tissu glisse sur sa peau d’albâtre pour laisser apparaître deux seins pleins et tendus. Par pur réflexe pudique, Julien tente de détourner les yeux, mais son corps ne lui répond plus. Aucun muscle ne réagit. La panique l’envahit tout à fait. Il veut crier, mais il n’y arrive pas. D’une main, la femme détache le baigneur furieux et l’amène contre sa poitrine. Incapable d'émettre le moindre son, le corps paralysé, il regarde la scène, impuissant. Le bébé se met à téter goulûment, pressant le sein des ses deux bras plastiques, sans jamais quitter Julien du regard. La mère aussi le regarde. Il y a quelque chose de lascif dans son expression. D’une main elle appuie la tête du baigneur contre sa poitrine. Son autre main glisse délicatement sous sa ceinture, s’insinuant lentement. Doucement, ses jambes s’écartent, faisant remonter sa jupe au ras des cuisses. Sa main s’active sous le tissu dans un bruit humide. Le jouet continue de téter avec force, laissant échapper un filet de liquide noir et épais à la commissure de ses lèvres. La jeune femme ferme les yeux. Ses lèvres s’entrouvrent dans un murmure plein d’extase tandis que les mouvements de sa main s’intensifient sous la jupe. Le baigneur a fini de téter et regarde Julien avec contentement. Son petit corps rose en plastique est barbouillé du liquide noirâtre qui continue de s’échapper en un flot régulier du sein tuméfié de sa mère.

Julien n’arrive pas à se réveiller. Il a beau savoir que tout ça n’est qu’un horrible cauchemar, il est incapable de se sortir de ce rêve. Le métro ne semble jamais vouloir s’arrêter de rouler. La nuit ne fait que commencer.

jeudi 26 juillet 2012

Toutes les femmes sont belles

La beauté des femmes me suffoque. Comme un choc violent à la poitrine. Tout l'air de mes poumons s'enfuit, remplacé par un mélange de sentiments. Le désir, mais pas seulement. De la gratitude un peu aussi.

La beauté d'une femme pour moi, ce n'est pas un ensemble de critères esthétiques précis. C'est quelque chose de plus ténu, volatile. Une impression, une sensation. Rien de tangible, rien de durable. Une mèche de cheveux, la forme d'une bouche, la pâleur touchante d'une peau, le ton sensuel et ambré d'une autre, le pétillant d'un regard, la langueur d'une démarche, un bracelet qui tinte, des lunettes qui habillent, l'élégance d'un corps deviné au travers de vêtements légers, l'opulence de formes à peine cachées, une attitude, un parfum...Mon coeur bat fort alors. Envie de les enlacer par la taille, de caresser leur corps nu, de glisser ma main dans leurs cheveux, de déposer un baiser au creux de leur nuque. Le désir se fait tantôt violent et charnel, tantôt tendre et bienveillant.

J'aimerais leur dire que je les trouve belle, qu'elles comprennent que je le pense vraiment. Loin de la flatterie ou du compliment facile, j'aimerais leur faire comprendre que chaque jour, chacune d'elle m'apporte quelque chose. Qu'elles ressentent cette beauté que je leur ai trouvé, c'est le remerciement que j'aimerais leur donner. Parce qu'elles donnent du goût à mes journées, je me sens un peu plus vivant.
A présent je réserve ces déclarations à la personne qui compte le plus pour moi, mais sachez que je n'en pense pas moins pour autant. L'amour n'a rien à voir là dedans. Si un jour, dans le métro, vous surprenez un regard un peu traînant de ma part, voilà à peu près ce que j'aurai aimé vous dire:

"Excusez moi de vous prendre au dépourvu de la sorte, mais sachez que je vous trouve très belle. Passez une bonne journée. Au revoir."

lundi 16 juillet 2012

Amitié. Stalking. Même combat.

      Je vois leurs photos sur Facebook, sur Instagram. Leurs soirées ont l'air folles. Putain, pourquoi moi j'ai pas été invité. C'est pas comme si c'était la première fois que je les voyais. C'est pas comme si on avait pas fait des dizaines et des dizaines de soirées ensemble. Quand je regarde les statuts qui défilent dans ma fenêtre Chrome, les photos et autres events que je vais rater, j'en viens à me demander ce qui fait que je ne resterai jamais pour eux qu'une connaissance parmi tant d'autres.

     En amour, il y a la friendzone, mais en amitié qu'est-ce qu'il y a? La juste-une-connaissance-zone? La we-know-each-other-for-sometime-yet-we-are-not-that-intimate-zone ? C'est une sensation assez désagréable de savoir que c'est déjà la fin du chemin. Que ces personnes m'ont déjà donné tout ce qu'elles avaient à me donner,  qu'elles n'ont plus rien à m'offrir. Un sourire, une bonne blague, deux minutes sur un balcon pendant que je fume ma clope. Et voilà, c'est fini. En fait, je ne saurai jamais vraiment rien de leur vie. De leurs peines, de leurs joies, de leurs inquiétudes. Je leur souhaiterai un joyeux anniversaire via facebook parce que j'aurai peur de trop en faire en leur envoyant un texto. Ils me répondront "Cool! Merci!".

      Mais je ne leur en veux pas. Je suis un peu jaloux de leurs amis à eux. Nous avons chacun des cercles d'amis assez vastes, et à nos âges ce qu'on recherche avant tout, c'est resserrer les liens avec ses amis proches plutôt que de diluer son temps sur trop d'amitiés. C'est comme ça, qu'on perd des amis. C'est comme ça qu'on empêche de nouvelles amitiés de se créer. Mais c'est naturel. C'est inexorable. Je comprends, mais ça ne m'empêche pas d'être triste.

     Moi de mon côté, j'aurais aimé plus tout de même. J'ai toujours accroché, et j'accroche encore. A leur personnalité, leur humour, leur talent. Nous avons tellement en commun, mais par pudeur je ne m'imposerai jamais, parce que je n'aimerais pas qu'on me le fasse. Parce que moi aussi, bien entendu, j'ai mis, de façon plus ou moins consciente, pas mal de monde dans cette zone qui interdit les rapports sincères et profonds.

     Alors comme un amour secret, je cultive mon affection à sens unique en stalkant l'Internet multimédia 2.0. Facebook. Twitter. Instagram. Tout est bon pour en savoir plus. Me gaver de fausse intimité. De photos. De gossip qui ne me regardent pas. Bref, je suis creepy. Mais toi aussi.

mercredi 27 juin 2012

Phénomènes extraordinaires

      Rien que d'y repenser, ma poitrine se serre. Ce sont des doigts fébriles qui attaquent le clavier de l'ordinateur. J'ai besoin d'en parler, j'ai la sensation que si je ne le fais pas, je vais exploser. Je viens d'être témoin de l'expérience la plus vraie, la plus forte et la plus touchante et déchirante à la fois. Ca a emporté une partie de moi. D'une certaine façon je ne serai plus jamais le même. J'ai vu la foudre s'abattre si près que j'ai cru en mourir. Un amour instantané tombé du ciel à la vitesse de la lumière sur un presqu'inconnu assis en face de moi.

      Le coup de foudre, je n'y croyais pas avant aujourd'hui. Si vous pensez que j'étais cynique, vous êtes loin du compte. Ceux d'entre vous qui me connaissent, le savent, je suis un rêveur doublé d'un grand romantique. Je crois en l'amour, je crois en la passion dévorante qui fait trembler les corps. Mais les livres, les films et la télévision ont tellement utilisé, rabâché, et détourné cet amour inconditionnel au premier regard qu'il en est devenu un mythe à mes yeux. Une chimère. Du bonheur à l'hollywoodienne. Les femmes de ma vie m'ont conquis, avec pugnacité. Une lutte quotidienne pour obtenir le monopole de mon coeur. J'avais donc du mal à imaginer qu'une si parfaite et totale reddition puisse exister. Mais ce que j'ai entrevu dans les yeux de ce quasi inconnu, le miracle dont tout le monde parle mais que personne n'a jamais vécu.

      Assis tous les deux à la terrasse d'un café parisien, nous attendions la venue de X, notre ami commun. C'était la première fois que nous nous retrouvions seuls tous les deux sans la présence d'une tiers personne. Il était de ces "amis" que l'on ne voit qu'aux soirées des autres. Assez souvent pour se souvenir de nos prénoms ou pour apprécier notre compagnie mutuelle, un verre à la main. Mais pas assez souvent apparemment pour ne pas se trouver gêné par un long silence qui s'installe. En avance l'un comme l'autre à notre rendez-vous, nous échangeâmes des banalités polies, des souvenirs et anecdotes mondaines, feignant une complicité surfaite. Pourquoi ne pas profiter de ce moment pour mieux faire connaissance? Repartir sur de réelles bases amicales? C'eût été admettre que les simagrées que nous venions d'échanger n'étaient que de la poudre aux yeux. La timidité et la maladresse sont l'apanage des hommes.

      Après un chassé croisé de regards fuyants, j'aperçus au loin derrière lui, une femme qui se rapprochait. Corsaire ocre, talons aiguilles rouges, tunique chamarrée au tissu léger laissant les épaules pratiquement nues. Une belle métisse aux cheveux coiffés en une longue natte reposant au creux de la clavicule. Apprêtée avec goût, sans excès. Le genre de beauté qui ne me touchent pas d'habitude, et pourtant mes yeux ne pouvaient se détacher tandis qu'elle avançait vers nous, sans doute pour s'installer en terrasse elle aussi. Bientôt je fixais mon regard sur mon "ami", absorbé dans l'étude des nuages au dessus de mon épaule. Je voulais ne rien rater de sa réaction lorsqu'il verrait apparaître la féline créature.

      Distraitement, ses yeux l'accompagnèrent du regard alors qu'elle dépassait notre table pour s'installer. Curiosité paresseuse du mâle Lambda. Et puis, comme si quelque chose d'étrange avait capté son attention, il commença à se redresser pour mieux l'observer. Une lente ascension. Peut-être quelque chose dans la grâce de ses mouvements. La bouche entrouverte, sans un mot, il la fixa plus attentivement. Avant qu'un orage n'éclate, on ressent comme une tension électrique au niveau de l'épiderme. Les poils des bras se dressent. A fleur de peau. En observant les pupilles de mon "ami" se dilater c'est ce que je ressentis. Sans doute le reflet du Soleil sur la peau cuivrée de son cou. Peut-être cette mèche de cheveux qui avait échappé à la brosse et qu'elle remit d'un geste négligé en s'asseyant sur son siège en osier. Je devenais peu à peu transparent. Le monde entier était en train de disparaître autour d'elle. Les mains de mon acolyte agrippèrent soudain la table, et tout dans son corps indiqua qu'il était sur le point de se lever, saisi d'une folie passagère. Ça tient à peu de choses. La clarté de ses yeux noisettes. La façon élégante qu'elle eut de croiser les jambes. Cette petite langue rose qui vint attraper la paille de son diabolo. Les poumons de mon voisin se gonflèrent violemment. Comme s'il s'éveillait d'un rêve oppressant. Comme si c'était la première fois de sa vie qu'il respirait. Sous mes yeux, elle venait de frapper. La foudre. 
      Cet homme d'habitude si ordinaire, venait d'être transfiguré sous mes yeux en une existence supérieure. Je me sentis tout à coup ému aux larmes. Chaque fibre de son être se mettait à vibrer à l'unisson. On eut dit, l'espace d'un instant, qu'il dégageait de la lumière. Terriblement gêné aussi. J'assistais à cette scène si intime, mais qui étais-je pour lui? A peine une connaissance assistant au plus bel évènement de sa vie. Je ne me l'avouais qu'après coup, mais j'étais incroyablement jaloux également. Des sentiments que jamais je ne connaîtrai le possédaient si violemment qu'il failli en éclater. Il voyait soudain avec des yeux nouveaux, des choses que je ne verrai sans doute jamais. Investi par un désir de vivre et d'aimer d'une intensité hors de portée des simples mortels.

      Je ne sais pas si vous avez jamais été témoin d'une pareille scène, mais si oui, vous comprendrez alors pourquoi j'ai voulu la partager avec vous. C'est incroyablement beau, et ça m'a rendu si triste pourtant. Il a été voir la fille bien entendu. Les fous ne connaissent pas la timidité ni la peur, l'amour donne des ailes. La suite de l'histoire, je ne la connais pas. Je suis parti juste après. Je n'avais plus ma place dans ce tableau. L'effroyable sensation de n'être né que pour cet instant m'étreint. Etre le témoin de ce moment fugace où l'homme se transforme en dieu. Quand l'amour déchire le cocon d'une existence. Une chenille condamnée à regarder voler les papillons, pour toujours.  

mardi 12 juin 2012

Influence

         Je suis influent. Dix mille deux-cents trente et une personnes attendent chaque jour que je dise quelque chose d'intéressant. Je suis drôle alors je n'ai pas vraiment à me forcer. Je fais une blague, 135 personnes me retweetent. Je fais une photo de mon sandwich, 239 personnes aiment. Je dis que je vais chercher du lait à la supérette du coin, un millier de personnes me propose une bouteille. Je suis leur télévision, mais j'existe en vrai. Ils cherchent désespérément à attirer mon attention et ça m'exaspère. Je n'ai pas envie de lire leur blog, je n'ai pas envie de répondre à leur DM. Je ne connais pas ces gens, ils me font peur. Mais je leur dois beaucoup. Ils m'énervent. Je leur dis que ce sont des connards: "LOL t'es trop drôle!". Je chie sur leurs opinions gratuitement et ils s'excusent de les avoir un jour eu. Je lance des polémiques juste pour les voir se sauter à la gorge en mon nom. Certains me détestent et continuent de me suivre uniquement pour me pourrir l'existence. Ceux-là je les aime bien. Ils me font rire. Quand j'en ai marre, je les jette en pâture à mes bigots qui les dévorent tout cru. 
      J'ai beaucoup d'amis. Je vais à beaucoup de soirées. J'ai des invitations pour des spectacles et des festivals. Je rencontre beaucoup de gens. J'ai toujours un truc rigolo à leur dire: "Eh regarde, j'ai fait un GIF avec un chat qui fait caca dans la bouche d'un bébé." Je ne dors jamais. Parfois je me sens seul alors je leur parle, et ils me répondent. Je suis brillant et je suis content que les gens le reconnaissent. Ce que je n'aime pas c'est qu'ils soient tous si bêtes et inutiles. J'aimerais les gifler mais ils sont trop loin. Alors je les insulte pour qu'ils arrêtent de me suivre. Mais même ça, ça ne marche pas.
       Et des fois je travaille aussi. Au moins, là on me fout là paix. Mais je sais qu'ils grouillent dans l'ombre, attendant des miettes de moi. Une armée d'idiots courants en tous sens en attendant que je leur donne un ordre. Un signe. Une parole. Un GIF de lolcat. L'angoisse.

lundi 4 juin 2012

ProlapsPoésie

NDLA: Je voulais m'essayer à la poésie, en traitant un sujet méconnu.
Ne criez pas à l'hérésie, à bon entendeur salut! (Putain ça rime!)


Pratique primale pour certains
Sujet sensible s'il en est.
Jeux de mains, jeux de vilains?
Voyons l'effet que cela vous fait.

Dépassement du soi physiquement,
Où quand l'homme se transforme en gant.
Découverte intestine
Joie enfantine
Exposer, exhiber son moi profond
A celles et ceux qui le voudront.

Dévoiler son jardin secret:
Une fleur exotique au parfum entêtant.
Pourtour de pétales roses acidulés
Comme ornement d'un gouffre béant.

Célébrons le grand retournement
De la raison et de son fondement.
Sensations phénoménales
D'un prolapsus rectal.

lundi 28 mai 2012

You picked the wrong guy...

      Ca t'apprendra petit fils de pute! Tu m'as volé mon portable, moi je vole ta vie. Semer le vent, récolter la tempête. Ca te dis rien peut-être? C'est vrai, tu n'écoutes sûrement pas en cours. Tu n'as que ce que tu mérites enculé! Voilà ce que ça veut dire : tu vas crever connard! Toi qui jouais les fiers à bras..."Eh mec tu me prêtes ton portable? J'ai un appel super important à passer. Juste 30 secondes." Bien sûr j'ai répondu non. Je suis pas un couillon, et je me suis pas acheté un GS2 juste pour le filer à n'importe qui dans le RER. Alors, je me suis pris un coup de poing en plein sur la joue. Je n'ai senti la douleur qu'après. J'étais déjà le cul par terre et tu enchaînais avec des coups de pieds dans les côtes. "Tu m'le files maintenant ton portable enculé?" Tu n'aurais jamais du faire ça tu sais. Tu es la goutte qui as fait déborder mon vase. Le connard de trop dans une vie de merde. Tu payes pour les autres. Facile de te retrouver, tu es resté dans ma rame tout le reste du voyage à te pavaner et me traiter de "PD !".
      Ce que j'ai préféré, c'est ce visage surpris quand la lame s'est enfoncé la première fois dans ton ventre. Genre "putain il est ouf ce mec!" Ce genre de regard. Genre toi t'as le droit de me tabasser pour me piquer mon portable, mais moi je peux pas te filer un coup de couteau? J'ai pas trop suivi ce que t'as essayé de me dire ensuite. Sûrement une insulte. Un deuxième coup dans les poumons MEC, ça t'apprendra la vie. Et que je gargouille et que je fais des bulles quand je respire. Alors mec, t'es un dur ou pas? Pourquoi tu te pisses dessus alors enculé? T'as vu ce qu'il te fait le "PD"? Personne n'a rien remarqué. Tu penses, les gens ne veulent surtout rien voir. Ils ont fait quoi les gens quand je me suis fait dépouillé? Que dalle! Ils ont fait que dalle ces enfoirés, et ils feront rien pour toi MEC! Faut pas me regarder comme ça tu sais, ça va rien changer. Au contraire, ça me donne des idées. Le train suivant arrive déjà en gare : on parie qu'il te verra pas à temps MEC? Je vais enfin savoir à quoi ça ressemble quand un type se fait rouler dessus par le RER. Toi aussi tu vas savoir! T'es pas content MEC? Le train arrive, t'es prêt MEC? 3...2...1...

mercredi 16 mai 2012

Souvenirs de vacances (2)

Au cas où vous débarqueriez, le début de l'histoire c'est ici: Souvenirs de vacances.

Je me réveille en sursaut. L’espace d’un instant, je me suis assoupi sur mon transat près de la piscine. Rapidement, je vérifie que personne ne s’est aperçu de mon absence passagère. Les animateurs font un sketch à la Benny Hill en se courant après autour de la piscine accompagnés par la musique ringarde de l’émission. Aux 4 coins de l’esplanade, fusil à l’épaule d’autres animateurs surveillent la scène. Ils ont l’air moins détendus, eux.

Comment ai-je pu m’endormir dans ce vacarme ? C’est sûrement l’alcool. Le bar de l’hôtel nous en sert à volonté. Coup d’œil au bracelet rouge à mon poignet. Sur simple présentation de ce petit bout de plastique, cocktails et buffets à volonté. Boire et manger, ça nous occupe. Boire surtout, ça nous fait tenir. Ça nous fait oublier aussi. Oublier le gros René. Plus large que haut, les joues rouges et la blague facile malgré l’adversité. Il a simplement refusé de participer au tournoi de pétanque du 2e jour. D’un coup de machette, ils lui ont ouvert le ventre devant tout le monde. Ses entrailles se sont répandues instantanément à ses pieds dans un chuintement visqueux. Boire pour oublier ses cris d’agonie, son visage. Les animateurs nous ont forcés à faire la chorégraphie du club devant lui. Les réticents se sont pris une balle dans la tête. Les autres ont dansé. J’espère qu’il aimait la Macarena car c’est la dernière chose qu’il a vu avant de s’effondrer dans ses propres entrailles.

Boire c’est tout ce qui nous reste. Même se nourrir est devenu une épreuve. Au réfectoire, parqués les uns contre les autres, nous effleurons à peine nos assiettes. Qui pourrait avoir de l’appétit dans pareille situation, à part Wallid peut être. Le chef des animateurs se bâfre tous les jours. Se goinfrant joyeusement à tous les repas, faisant d’innombrables aller-retour jusqu’au buffet, un sourire joyeux aux lèvres. Un adolescent en pleine croissance. En d’autres circonstances, il en serait presque attendrissant de naturel. Souvent, il vient s’assoir avec nous pour faire la conversation. « Alors, ça va le jeunes ? ». Que voulez-vous répondre à ça ? Je fixe mon assiette avec intensité en pensant à autre chose. A René, le gros syndicaliste qui n’a pas voulu fermer sa gueule. Comment honorons-nous son courage ? En riant jaune aux blagues graveleuses des animateurs ? En bronzant au bord de la piscine ? En applaudissant au spectacle chaque soir ? Le spectacle…Ca me revient soudain, il faut que je me dépêche d’aller en salle de répétition. Je dois m’entraîner pour le spectacle de ce soir : Dirty Dancing. Je fais la fille, Baby. Le porté est difficile. Qui sait ce qu'ils pourraient nous faire si on venait à le rater.

Je me dégoûte. Une bande de rats, de lâches. Voilà ce que nous sommes.

lundi 14 mai 2012

Souvenirs de vacances

        Le bandeau sur les yeux j’avance à petit pas. Voilà plus de trente minutes que nous marchons de la sorte, lançant un pas après l’autre dans l’obscurité espérant trouver le sol sous nos pieds. C’est épuisant. La lumière du Soleil brûle ma peau. La chaleur est insupportable et la chemise cintrée que j’ai eu l’idiotie de choisir ce matin pour aller à l’aéroport est sûrement maculée de larges auréoles de transpiration. « Avance ! » m’invective-t-on en me poussant dans le dos. Je manque de trébucher mais parviens à me rattraper in extremis. D’autres avant moi sont tombés, ceux-là je ne les entends plus. J’en conclus qu’il ne vaut mieux pas tomber. « Où est-elle ? Où est ma femme ? » demande nerveusement quelqu’un derrière moi. C’est la voix d’un vieil homme. Une voix éraillée chevrotante. Le pauvre homme, on lui a enlevé sa moitié, il semble perdu. « Elle est avec les autres femmes. Elles vont dans un autre camp. T’inquiètes pas papy, on va bien s’occuper d’elle. » répond l’homme qui m’a sûrement poussé à l’instant. J’entends un bruit sourd et un corps qui chute au sol. Le vieil homme se met à geindre, à sangloter sûrement. Je ne peux rien faire. Je dois continuer d’avancer ou bien c’est moi qui finirai par terre. Notre bourreau part dans un grand éclat de rire. Ce rire me glace le sang. C’est un rire clair. Une voix aérienne, jeune, très jeune. Je lui donne à peine 18 ans. Qu’est-ce qui peut mener un enfant à commettre ce genre d’atrocités de son plein gré. Le désespoir ? Le chômage ? La pauvreté ? Le manque d’éducation ? Pas le temps de réfléchir, je dois continuer d’avancer. Un pas après l’autre. Les minutes passent et le vieil homme continue de sangloter, pendant un temps indéterminé. Longtemps. Et puis notre jeune bourreau reprend la parole : « C’est bon, vous êtes arrivés. Vous pouvez enlever vos bandeaux. ». Nous nous exécutons comme un seul homme. La lumière éclatante me brûle les yeux. Après quelques secondes de mise au point, je discerne enfin correctement le paysage. Des palmiers, une grande piscine à débordement, eau limpide, bleue turquoise. Nous sommes à l’entrée d’un grand bâtiment design aux larges bais vitrés. Un hôtel. Je ne comprends pas. Où sommes-nous ? Pourquoi nous avoir enlevé ? Que faisons-nous ici ? La même stupeur semble frapper mes camarades d’infortune. Un assemblage hétéroclite de personnes âgées, de piliers de bars ventripotents aux joues rouges, de familles… Nous échangeons des regards inquiets sans trop comprendre ce qui nous arrive. Soudain, en hauteur en travers de la façade de l’entrée de l’hôtel, je remarque une banderole rouge écrites en larges caractères blancs. Ce que je lis n’a aucun sens. Pourtant, plusieurs voix enjouées répètent les mêmes mots que je viens de lire. «BIENVENUE AU CLUB LOOM !!» lancent en cœur plusieurs jeunes personnes qui se dégagent de la foule. Des jeunes hommes et femmes de 18-20 ans, beaux et bronzés, même short rouge et T-shirt blanc, une arme en bandoulière. Ils se rassemblent face à nous tous devant les portes de l’hôtel et répètent à nouveau, sourire d’un blanc éclatant aux lèvres, armes pointés dans notre direction : « BIENVENUE AU CLUB LOOM !! BIENVENUE EN VACANCES ! ».

       Si la suite vous intéresse: suffit de demander.

jeudi 12 avril 2012

Le pervers

Note de l'auteur:
 Le texte qui va suivre est très particulier et va sûrement vous choquer. Mais surtout, si vous décidez de le lire, LISEZ LE JUSQU'A LA FIN car il n'est pas dénué de sens.
Pour ce texte, il fallait que je me dépasse, que je repousse mes limites habituelles. Fini, la sensualité et l'érotisme. Aller chercher du côté obscure de la perversité, la déviance, la maladie mentale. C'était un travail assez éprouvant. Mais enrichissant dans un sens.
Je le répète, je suis quelqu'un d'équilibré et de sain d'esprit, alors si vous ne lisez pas jusqu'à la fin, vous ne saurez pas ce que je voulais dire avec ce texte. Âmes sensibles et -18 ans s'abstenir.



Lorsque je t’ai aperçue, me donnant si innocemment le dos,  j’ai tout de suite su que ça serait toi. Jambes finement galbées dans un collant résille à motifs. De petites fesses rebondies moulées dans un très court short en jean coupé. Un large T-shirt gris imprimé "BITCH", repose mollement sur ton corps, épousant l'arrondi de tes seins, glissant de ton épaule, découvrant largement ta nuque bronzée, marquant la cambrure de tes reins. De longs cheveux châtains clairs aux mèches blondes qui ruissellent dans ton dos. Une silhouette élancée, pleine de vie. Une étudiante sûrement. Pourtant, un charme adolescent.
Malheureusement,  je ne peux plus m’attarder dans l’étude de ton corps, la masse compacte des salariés pressés derrière moi exige, par poussées intermittentes, que je m’avance enfin dans la rame. Les passagers ont fini de descendre, l’instant est crucial. En quelques foulées, parvenir à me placer près de toi et laisser la foule faire le reste du travail. Au fur et à mesure que le wagon se remplit nos corps se rapprochent, s’effleurent, puis se touchent totalement. Tu dodeline de la tête en secouant tes cheveux, l’air de rien, de la musique dans les oreilles. Le signal de fermeture des portes retentit, mais des gens continuent de monter au mépris d’élémentaires soucis de civilité. Je les en remercie, car à présent mon corps est totalement blotti contre le tien. Ma pauvre enfant, te voilà tout à fait coincée contre la barre, emprisonnée par une muraille d’épaules et de mallettes.
Et derrière toi, il y a moi, emboité dans une position inextricable. En équilibre précaire, les bras soudés les long du corps par la pression des autres usagers, incapable de faire le moindre mouvement pour me dégager. La foule nous comprime l’un contre l’autre. Mon entrejambe collé à ton short, mon buste tout serré contre ton dos. La plupart des gens seraient terriblement gênés dans une telle position, mais moi, je ne boude pas mon plaisir. Les portes se ferment enfin et le train se met en branle, ballotant nos corps l’un contre l’autre. Tu es plus petite que moi, ainsi j’ai le nez au sommet de ton crâne que je peux humer à loisir. Tes cheveux sentent bon. Une senteur exotique et sucrée. Dans tes fines oreilles au duvet doré, des écouteurs diffusent une musique que je ne reconnais pas. Quelque chose de rythmé en tout cas. Tu te balances, ondules, imperceptiblement au rythme de la musique, pressant de tes fesses mon sexe qui durcit.
Tu sais ce que tu fais, provocante. Peu à peu tu me rends fou.  Ton parfum m’intoxique, parasite mon cerveau. Ces légers frottements de nos tissus, je les ressens à présent dans tout mon corps. Chaque fibre résonne en moi.  Peu à peu je me laisse envahir par la montée du désir. Une intense chaleur diffuse depuis mon bas ventre à travers tout mon corps. La chaleur de ses cuisses, de son con qui m’attend. Mon sexe, s’est fait pierre, palpitant et sensible, prêt à exploser. Des bouffées de chaleur m’envahissent par vagues successives et tu continues de danser. Insolente petite pute. Tu fais semblant que je n’existe pas, mais tu as mis le feu aux poudres. Je ne cherche pas à juguler les émotions contradictoires qui m’assaillent, je me laisse envahir tout à fait. Délicieuse perte de contrôle programmée. Le corps qui palpite au rythme du sang pulsant dans ma verge. Les poumons saturés de sensations qui affluent. La peau à vif. Ma raison se dilue un peu plus à chacun de tes mouvements de bassin. Et le parfum de tes cheveux qui me rend fou. Il monte à mon cerveau détruire mes neurones, dissoudre ma volonté.
Ce moment où mon corps semble développer sa propre conscience, je presse un peu plus mon aine contre tes fesses. Tu fais mine de soudain réaliser ma présence. Tu te retournes, feignant un air indigné en sentant mon vit qui palpite entre tes fesses rebondies. Le rouge t’es venu aux joues. C’est mon sexe qui te met dans de tels états jeune fille ? Tu n’as pas à faire semblant devant ces gens, avec cet air outré. Ton regard noir, ta petite bouche boudeuse. J’imagine ces lèvres minuscules qui s’ouvrent en grand pour engloutir ce tison ardent qui brûle mes cuisses à présent. J’ai soudain envie de lécher ce visage mutin. De t’agripper violemment par les joues et parcourir tes paupières, ton front, ton menton avec ma langue. Te salir car tu es tellement belle. Petite garce, tu fais bien semblant d’être dérangée alors que tu m’excites depuis tout à l’heure avec ce corps effronté. Ce que j’aimerais libérer de leur prison ces seins ronds qui donnent un si joli relief à ton T-shirt. Mon corps frémit tout entier à l’idée qu’il serait si facile de déchirer ce bout de tissu inutile. Déchiqueter ces fripes pour admirer la splendeur de cette peau ferme et délicatement ambrée, la façon dont se tiennent tes seins. T’arracher ce short, déchirer tes sous-vêtements, tes collants. Caresser cette toison bien entretenue en petit triangle, car tu es ce genre de jeune fille perverse qui jouent les innocentes mais qui s’épilent le sexe pour se faire prendre par le premier venu. J’enfilerai deux doigts dans ton con déjà trempé, car tu mouilles, oui je le vois bien malgré tes faux airs outrés. Je me délecterai de cette expression lubrique qui passera sur ton visage d’ange quand mes doigts s’enfonceront profondément. Très vite, je n’y tiendrais plus, enlevant mon pantalon d’un geste, je planterai mon vit brûlant en toi. A voir ton corps si menu, tu dois avoir une chatte bien serrée. Quelle bonheur ça serait de le sentir s’enrouler autour de moi, me presser la moelle, me téter jusqu’à la dernière goutte. Mon cœur s’emballe. Rien que d’y penser, j’ai du mal à respirer, je deviens fiévreux.
Je dois faire peur à voir car tu prends un air dégouté. Tu as réveillé la bête tapie au fond de moi, tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même. Tu ne peux même pas fuir, le destin nous a réunis et la foule nous tient prisonniers l’un de l’autre. Avec de minuscules pas, tu tentes de passer de l’autre côté de la barre, mettre un obstacle entre nous. Mais l’entreprise n’est pas aisée. Des employés de bureau, tailleurs et costumes, casques sur les oreilles, livres à la main, t’empêchent de progresser du moindre centimètre. Tu te tortilles néanmoins frénétiquement dans l’espoir de m’échapper, mais ces mouvements nerveux de fesses et de bassin frottent énergiquement mon entrejambe d’une délicieuse façon. Je me presse encore un peu plus contre toi. Mon cerveau est vide, mon esprit est blanc, ma poitrine me fait mal. Tu te démènes à présent pour tenter de mettre de la distance entre nous. Ton corps mince qui se trémousse. Je perds la raison. Je ne suis plus qu’un pénis turgescent et des couilles vibrantes, prêtes à exploser.
Je t’imagine nue à nouveau. Je suis derrière toi. Je m’enfonce dans ton petit cul serré. Tu t’agites nerveusement en poussant de petits gémissements de truie en chaleur. Ta crinière qui ondule, ta peau bronzée. Tes fesses fermes qui rebondissent au rythme de mes reins. Je viens d’atteindre le point de non-retour. Je vais jouir je le sens. Ici, dans cette voiture de RER. Debout, au milieu de ces inconnus. Je ne vois plus rien. Comme un poisson, ma bouche s’ouvre et se ferme à la recherche d’un oxygène disparu. Chaque muscle de mon corps se tend à l’extrême. Mes mains agrippent tes deux poignets que j’attire à moi avec force. Collée contre moi, tu te débats en hurlant. Je n’entends plus. Je ne vois plus. Mais dans ma tête j’ai ton visage. Ta petite bouche aux lèvres d’un rouge tapageur entrouverte dans l’attente de ma semence. Ton regard espiègle qui m’invite à jouir sans retenue. Ce visage de petite catin lubrique.
Ah…J’y suis. Vite ! A la hâte je baisse ma braguette et place mon sexe dans tes mains. Je jouis. Un long et puissant râle s’envole de ma gorge tandis que j’envoie la purée. Dans mon rêve, je t’éclabousse et recouvre ton beau visage de giclées blanches que tu lapes goulument et recueilles du bout du doigt. Dans le RER, je sens tes doigts qui tentent de m’échapper, mais l’extase me donne une puissance insoupçonnée. De longs jets brûlants viennent souiller tes petites paumes et tes vêtements sexys. Ca ne veut pas s’arrêter. J’agite frénétiquement tes mains poisseuses sur mon vit. Je jouis sans fin et mes poumons vibrent de ce cri qui me vide.
En entendant tes cris de panique et mon hurlement bestial, les gens se sont écartés et tu réussis à te dégager. La foule me regarde partagé entre le dégout et la haine. Je les vois comme à travers la brume, spectres d’une autre réalité. Je suis un monstre. Le sexe à l’air, je continue de jouir, le corps secoué de spasmes. Et puis le premier coup s’abat sur moi, me ramenant à la réalité. Au visage, de plein fouet. Je recule en titubant sous l’impact et les gens s’écarte sur mon passage. Je suis une ordure dégoutante, personne ne saurait vouloir me toucher. Ca ne s’arrête pas tout de suite pourtant. Encore tétanisé de plaisir, je reprends enfin mon souffle et la douleur me cueille stoppant net tous résidus de plaisir. La brume disparaît soudain. Ils sont là, tous à me regarder. Les poings serrés, les mâchoires crispées. Derrière eux tu pleures. Calmement, mais d’un geste rapide, je remets mon sexe en place et referme ma braguette. Au moins ça qu’ils n’auront pas. Ils vont me tabasser je le sais, pour se défouler un peu sur le pervers. Et puis ils appelleront la police. Je peux endurer leurs coups. Je peux endurer l'emprisonnement. Ça ne me dérange pas. La prison est un endroit confortable, et je n’y serai sûrement pas très longtemps de toute façon. Je suis un homme patient. Après quelques temps, je sortirai de nouveau. J'arpenterai les rames de RER bondés, à la recherche d’une nouvelle fille docile comme toi.

lundi 9 avril 2012

Shit just got surreal!

Cela fait quelques années que ça me pend au bout des fesses, comme un de ces étrons longs et collants dont on ne sait jamais comment se débarrasser. Avec un titre de blog tel que le mien, on se serait attendu à ce qu’un tel article arrive bien plus tôt. Dernièrement, je parle beaucoup d’écriture, mais si peu de mon autre grand plaisir solitaire. Et bien aujourd’hui, tenez-vous le pour dit, je vais tout lâcher sous vos yeux ébahis.

Ecrire c’est comme chier…Je vous ai largement assez bassiné je pense avec le plaisir que j’éprouve à assouvir mes besoins souvent pressants d’écriture. Du délice ressenti, du soulagement infini quand je me vide sur une page blanche. Eh bien dites-vous que j’aime autant chier que j’aime écrire. Sans blague. Ceci n’est pas un effet d’annonce. Chier ça défonce ! Enfin, dans le bon sens du terme, mais parfois ça défonce littéralement, mais cela nous y reviendrons peut-être.


Toute ma vie, je n’ai jamais réussi à comprendre pourquoi la fonction d’excrétion était à ce point tabou dans notre société. Pourquoi ne peut-on aborder la défécation que sur le thème de la blague dans les médias ? Pourquoi ne peut-on pas parler ouvertement de ça en société ? Au même titre que la respiration, l’alimentation, l’hydratation, les fonctions de déjection sont naturelles et vitales. Nos aïeux l’avaient bien compris, eux. Il fut un temps où pour s’enquérir de la bonne santé de son entourage, on lui demandait si son passage à la selle s’était déroulé convenablement. « Ça va bien aujourd’hui ? ». Eh oui, l’expression vient de là. Quelle belle époque tout de même. On pouvait alors discuter sans honte de ses productions intestinales. C’était même un sujet de première préoccupation. Quel dommage que tout cela ait tant changé. A présent, je me vois mal répondre « Oui, très bien merci. J’ai démoulé un magnifique saucisson d’une belle couleur ambrée ce matin. » à mon chef, lorsqu’il me demandera comment ça va. Et oui, la pudibonderie est venue saccager tout ce qui avait du sens.

Arrêtons ces enfantillages autour du sujet, voulez-vous ? Je parle ici de choses très sérieuses. Je ne sais pas si vous vous rendez compte, mais quelqu’un de constipé c’est un mort en sursis, une urgence médicale au même titre qu’un arrêt respiratoire. Pourquoi ne devrait-on aborder la scatologie uniquement que sur le mode de la blague potache ? Pourquoi les personnages de livres, de séries ou de films ne passent-ils plus de temps assis sur leur cuvette ? Autant de questions auxquelles je n’ai aucune réponse à apporter. Je voulais juste attirer votre attention, et il me semble qu’à présent je l’ai. Nous pouvons donc à présent parler de la chose entre amis et avec le sérieux qu’il se doit.

En amis, oui j’ai besoin de parler à des amis ici car la conversation prend un tour plutôt intime à présent. Je vous propose en effet de discuter un peu plus avant des petites joies qui entourent le passage à l’acte. Ne rougissez pas s’il vous plaît, nous sommes entre adultes. Avec une moyenne de deux étrons minimum par jour, on peut dire de moi que je suis quelqu’un qui va plutôt bien. Et si j’exhorte les gens à ne pas lire aux toilettes, à l’instar d’Henry Miller, c’est parce qu’il faut être à tout à ce qu’on fait pour en retirer quelque chose d’intéressant.

Prenez un jour le temps de réellement ressentir les choses. Si vous ne poussez pas comme un taré pour expulser votre « Number Two », vous pourrez alors le ressentir se balader dans votre colon. Sensation qui est loin d’être désagréable il faut l’avouer. Les homosexuels et autres adeptes de la sodomie l’ont bien compris. L’étape suivante, c’est le passage de l’anus, épreuve à laquelle la plupart d’entre nous échouent lamentablement, débitant, voir tronçonnant en petits morceaux ce qui aurait pu devenir un fier et robuste serpent. Soyez patients messieurs dames. Restez concentrés, laissez tomber quelques instants vos magazines car l’instant est grave. La délicatesse qu’exige l’opération d’expulsion va requérir beaucoup de vous, physiquement et mentalement. Il va falloir faire appel à la bonne dose de contraction abdominale et ne relâcher son sphincter anal qu’au moment opportun, avec un timing digne du saut en hauteur dans track’n field. La chirurgie du cerveau à côté de ça, c’est une partie de Dr Maboul. Parfois se présentent à nous des challenges toujours plus difficiles à relever. Une consistance particulièrement visqueuse, ou bien un diamètre à se défoncer le fondement. Devant ces adversaires plus tenaces, gardez votre sang-froid et réfléchissez à la bonne stratégie à adopter. Mais n’oubliez pas une chose, aussi dure que soit ce moment à passer, à un moment ça finira bien par sortir : alors courage !

Et vous voilà sorti vainqueur de cette lutte intestine, debout devant la cuvette, un air de triomphe sur le visage. La bataille fut âpre, mais la victoire n’en a que meilleur goût. Vous voilà vidé, mais remplit d’une immense fierté. Contemplez à présent l’ennemi défait, ou le chef d’œuvre que vous venez de créer. Je vous vois sourire, je vais trop loin peut-être ? Mais je suis plus que jamais sérieux. Regardez cette merde droit dans les yeux bon sang, vous lui devez bien ça !
Très tolérant et ouvert de nature, il n’y a qu’une seule catégorie de personne que je déteste : les gens qui répugnent à regarder avant de tirer la chasse. Cette engeance débile et si peu créative, manquant tout à fait de respect, d’estime et de considération pour leurs propres créations, sont les ennemis de l’humanité. Si d’ailleurs, vous faisiez partie de cette caste de mal torchés, je vous engage à quitter ce blog sur le champ. Je n’ai pas besoin de lecteurs dans votre genre. Ouste ! Dehors les culs serrés !

Mais je m’emporte, revenons donc à nos déjections. Soyez en fiers, ce sont vos créatures. Nées de votre travail, votre sueur et parfois votre sang. Appréciez-en la couleur, éprouvez mentalement son élasticité, absorbez-vous dans l’étude de sa forme. Cette crotte, c’est un peu de vous. Au-delà des pures émotions d’éveil artistique que pourra susciter en vous cette étude minutieuse, elle a également une fonction très pragmatique. En effet, l’état de vos selles vous renseignera sans faillir sur le bon fonctionnement du temple qu’est votre corps. Depuis l’aube des temps, la médecine a recouru à ce diagnostique certes rudimentaire mais d’une efficacité indiscutable. Devenez votre propre médecin, auscultez votre merde. La sécurité sociale, non, la France vous remerciera.

Pour les plus curieux d’entre vous, sachez qu’un éminent scientifique à mis en place une classification en différentes catégories de nos numéros deux. Grâce à ce saint homme, il nous est désormais possible de décrire avec efficacité et force détails nos plus belles réussites lors de diners en société. « Hier, je me suis délesté d’un type 3 à peau dorée d’une consistance exquise ». Vous repenserez à moi, je l’espère, quand votre auditoire se lèvera dans une standing ovation spontanée pour applaudir la justesse et la beauté poétique d’une telle description.

Ne vous reste plus qu’à tirer la chasse et regarder, la larme à l’œil, s’en aller votre nouvel ami. Oui, un ami. En si peu de temps, vous avez partagé tant d’épreuves… Je n’ai pas honte du mot, il s’agit bien d’un ami, un camarade. Si de purs soucis d’hygiène élémentaire ne m’en empêchaient, je le prendrai dans mes bras dans une ultime étreinte. Ne le quittez pas des yeux tandis qu’il tourbillonne dans la cuvette. Tel Santiago, dans le vieil homme et la mer, regardez le fruit de tant d’efforts, de batailles et de vains espoirs se faire emporter par l’inéluctable destin.

C’EST L’HISTOIRE DE LA VIIIIIIEEEEEEEEEEE ! LE CYCLE ETERNEEEEEEEEEEEEEEL ! Adieu l’ami… A jamais !

jeudi 5 avril 2012

This is the End - Episode 4


"Je suis prêt.", lance Jérôme à son reflet dans le miroir. Les mâchoires serrées, un regard vert métallisé planté dans les yeux de son double, il répète la phrase à nouveau. "Je suis prêt !" Il recommence sans se lâcher du regard, plus fort encore. "JE SUIS PRET !!" De l’écume gicle de ses lèvres. Une dernière fois, calmement, le regard froid, en prenant soin de bien détacher chaque mot, il répète une dernière fois son mantra à mi-voix. "Je suis prêt." Une batte de baseball dans la main gauche, un pistolet à clou dans la main droite, il se retourne lentement et fait face à la porte d’entrée de son appartement avec résolution. Dans son dos, un gros sac remplit de surprises pour ses éventuels assaillants dont il réajuste machinalement les bretelles. Jérôme est prêt, il l’a toujours été.





Dès son plus jeune âge, quand on lui parle de l’apocalypse au catéchisme, il comprend qu’il ne s’agit pas que d’une histoire pour faire peur aux hérétiques. Il pressent que la fin du monde, la fin du monde tel que nous le connaissons, arrivera un jour. Pas forcément comme le décrit la Bible, mais un jour le monde se trouvera bouleversé de façon irréversible. Du haut de ses 7 ans, il en est intimement convaincu. Et depuis ce jour, il se prépare. En empruntant à la bibliothèque toutes sortes d’ouvrages traitant de près ou de loin de la survie en conditions extrêmes. Certains sérieux, d’autres complètements délirants. Il les lit tous, sélectionnant et notant les idées, les situations, les conseils qu’il juge importants pour s’en faire un guide de règles pratiques de survie en cas de fin du monde. Toutes ces règles, il les connait encore par coeur. Ça lui arrive encore de compléter son guide, un vieux cahier spirale à petits carreaux, avec des conseils de sagesse supplémentaires glanés dans des comics sur les zombies ou encore auprès de ses co-instructeurs pendant un stage de survie. Dans les soirées, ses amis lui demandent régulièrement de réciter telle ou telle règle en ouvrant le cahier à une page au hasard. Un excellent entraînement : l’alcool simulant un état de confusion mentale similaire à celui provoqué par le stress de fin du monde.

Mais Jérôme ne s’est pas contenté de créer un guide non-officiel à la survie in-apocalypse, il a aussi décidé de développer et d’entraîner son corps. Ainsi, dès l’adolescence, il se met à pratiquer le Krav Maga, discipline qu’il pratique encore, en tant qu’instructeur. Aucune technique de frappe, d’immobilisation, de soumission ne lui est étrangère. Il a fait de son corps une machine à briser des os bien huilée et efficace. Les arts martiaux ne lui suffisant plus, ces dernières années il s’est mis à la gymnastique et à la pratique du "Parkour", afin de développer une faculté de déplacement créative en fonction de son environnement. La fuite n’étant parfois pas qu’une simple option, il a élevé son sens de l’équilibre et la qualité de ses mouvements bien au-dessus de la moyenne.


Lors de ses stages de Krav Maga avec les militaires Israéliens, il apprend le maniement des armes. Armes blanches, couteaux, machettes, bâtons, tonfas, armes à feu, armes de poing, fusils d’assauts, fusils de précision. Il touche à tout. Malheureusement, la possession d’arme n’est pas une chose très simple en France, il renonce donc à en acheter. Avoir un permis d’arme est quelque chose de bien trop contraignant. C’est comme déclarer à la police : « Je suis dangereux, suspectez moi à la moindre fusillade svp ». De plus, dans une situation de survie en milieu apocalyptique, il lui arrivera sûrement de devoir transgresser un bon paquet de lois et de tabous moraux, allant de l’assassinat au viol. Aucun besoin, dans ces conditions, d’attirer d’avantage l’attention sur lui avant même l’avènement de la fin.






Jérôme est prêt donc. Prêt pour une petite expédition de ravitaillement, de pillage devrait on plutôt dire. Mr Pringles est sorti de sa télévision pendant la pub ce matin, alors qu’il était en train de prendre le petit déjeuner. Une sacrée surprise. Aucune poêle, couteau, assiette qu’il lui lança en s’enfuyant ne semblait l’entamer. Le moustachu 2D se contenta de gober les projectiles qu’il mâcha dans un croustillement tonitruant. Et puis, dans la panique il parvint à se fabriquer un lance-flamme de fortune avec une bombe désodorisante et un briquet. Le moustachu blafard s’enflamma dans un cri aigu de surprise, puis à la manière d’une photo qu’on brûle, se racorni, recroquevillé en boule incandescente avant de disparaître en fumée. Passé la surprise initiale, Jérôme s’était dit que ça avait commencé. La fin du monde tel qu’on le connaît.


Il est donc temps de faire quelques courses, la fin du monde ça creuse. Le voilà donc en train de claquer la porte de son appartement derrière lui et descendre les escaliers à petits pas. En chemin, il croise son voisin du 2e qui le salue cordialement, pas inquiet pour un sou. "Vous allez faire du bricolage ?" lui demande-t-il. Jérôme regarde un instant la batte dans sa main gauche, puis le pistolet à clou dans sa droite. "Oui, en quelque sorte." répond Jérôme poliment avant de reprendre sa descente. Sur le pas de la porte cochère, maintenue ouverte par un crochet, il prend une grande inspiration. Fin du monde me voici.





Pas de voiture en feu, pas de panique, pas de hurlements, pas de pillards non plus. Jérôme se sent un peu bête de s’être monté le bourrichon pour si peu. Les passants le dévisagent curieusement, tandis qu’il range son pistolet à clou et sa batte de baseball dans le sac de sport, un peu honteux. Pendant ce temps, Benjamin tente de créer une diversion en poussant Jenny à découvert sur le parvis de la Défense. L’inspecteur Malterre regarde, impuissant, refroidir son café, un téléphone différent collé à chaque oreille : Le GIGN et la préfecture. Ça doit être le début se dit Jérôme. L’apéro-fin-du-monde, les amuses gueules apocalyptique. Il avance en fixant ses pieds d’un air concentré au gré des rues du XIIIe arrondissement de Paris. Tant qu’à être sorti de son appartement, il va en profiter pour faire quelques courses. En attendant qu’il y ait du feu, de la panique, des pillages et des morts. Direction place d’Italie.





Ben s’est pris une balle dans en pleine tête et pourtant son corps n’est plus dans l’escalier qu’il tentait de rejoindre. Jenny ouvre la portière pour sauter hors d’un taxi qui fonce en zigzag vers l’entrée du commissariat de la Défense. L’inspecteur Malterre, d’un coup de volant rapide, évite le corps de la jeune asiatique qui vient pratiquement de se jeter sous ses roues. Jérôme, quant à lui, se demande si demain il y aura la vraie fin du monde. Il glisse distraitement une boîte de maïs dans son panier en plastique rouge prêt à déborder. « Promotion sur les sachets de réglisse Haribo ! Profitez de notre offre exceptionnelle : -30% sur les sachets de réglisse Haribo. Aujourd’hui seulement ! Haribo c’est beau la vie ! Rendez-vous dans votre rayon confiserie. » "Chic !" se dit-il, grand amateur de réglisse. Immédiatement, ses pas l’entraînent vers le rayon de la tentation. Son panier est déjà rempli à craquer de nourriture en boite, et son bras gauche, chargé d’un lourd pack d’eau, commence à le faire souffrir mais la promesse d’un petit extra le fait tenir." Le glucose c’est bon pour le cerveau" se ment-il pour se donner bonne conscience. Fin du monde ou pas, quand on est gourmand…




Dans le rayon, il y a une petite fille et sa mère qui regardent tétanisées quelque chose en face d’elles. La petite fille d’environ 6 ans porte une robe noire moulante et une doudoune courte à paillette qui lui donne une allure de pute pré-pubère. Elle pointe du doigt quelque chose non loin et regarde sa mère avec exaltation. « Regarde Maman. C’est Haribo pour de vrai ! ». La mère, une énorme femme maquillée de façon outrancière, et comme contenue par ses propres vêtements, ne quitte pas des yeux l’apparition en plein milieu du rayon. Elle regarde, incrédule, le petit garçon bouffi, la peau rose, T-shirt jaune et pantalon rouge, un poing sur la hanche et dans la main droite une énorme bobine de réglisse noire. Il rit sans bruit, hoquetant, la bouche énorme, les yeux au ciel. Sans gestes brusques, mais avec rapidité, Jérôme s’accroupit. Faisant passer son sac devant lui sans quitter des yeux l’improbable scène qui se déroule sous yeux, il remplit son sac avec le contenu de son panier et quelques bouteilles d’eau. Pillage préventif. « On va oublier les bonbons pour le moment » songe-t-il en faisant repasser le sac rempli dans son dos.


Lorsqu’il se relève, personne n’a bougé. Le petit Haribo continue de se gausser en sourdine, la grosse maman et sa fille continuent de le fixer, le souffle coupé. Jérôme quant à lui, hésite sur le plan d’action à adopter. Son instinct lui ordonne de s’en aller au plus vite. Mais la curiosité le pousse à rester pour en savoir un peu plus. Plus il en sait, sur ce qui se passe, mieux il pourra se préparer. Le petit à grosse tête continue de hoqueter, expirant de l’air sans jamais avoir besoin d’en inspirer. Il ne ressemble absolument pas à un vrai petit garçon. Ses traits grossiers de bande dessinée, ce corps rose qu’on dirait en carton-pâte, ces gros cheveux noirs brillants de Playmobil. Une impression malsaine se dégage de la chose. Comme si une personne de petite taille avait enfilé un costume, mais Jérôme sait que ce n’est pas d’un costume dont il s’agit. Ce corps bouge trop naturellement. C’est quelque chose qui existe, alors que ça ne devrait pas. Ca lui file la chair de poule. Finalement, le bonhomme rose s’arrête de rire d’un seul coup, sans crier gare. Comme s’il se réveillait, hypnotisé par son propre rire. Son regard mauvais de petit garnement mal proportionné se pose sur les trois spectateurs qui l’observent depuis tout à l’heure. « J’ai peur Maman! » se met à geindre la petite fille en s’accrochant au pylône qui sert de jambe à sa génitrice. Celle-ci commence à s’énerver pour masquer son malaise dans un fort accent du Nord. « Eh toua, cha vo po d’faire pleurer mo fille comme cho ?! ». Elle agite ses bras en tous sens pour donner de la légitimité à son propos, sa graisse se met en branle et ne semble jamais vouloir s’arrêter. A peine a-t-elle le temps de finir sa phrase qu’elle se retrouve le cou entouré de réglisse. La main crispée sur le pistolet à clou, Jérôme lève le bras et met en joug Haribo. La mère lui lance un regard suffoqué. Elle n’a rien vu venir. Le geste du marmot en culotte rouge était bien trop rapide. Les yeux de la grosse nordiste crient les mots qu’elle n’arrive pas à prononcer « A l’aide! ». La petite fille se met à hurler de terreur. Le garçon bonbon fixe Jérôme avec un sourire narquois, le défiant d’utiliser son arme. L’espace d’une seconde le temps est suspendu, ils se fixent tous deux, indécis. Subitement un flash de lumière verte parcourt à toute vitesse le cordon de réglisse jusqu’à la grosse dame, changée sur le coup en un gigantesque bonbon gélatineux vert. La petite fille recule dans un sursaut de stupeur. Là où se trouvait sa mère, il y a désormais une grosse forme verte, translucide criblée de bulles d’air immobiles. « N’oubliez pas la promotion exceptionnelle sur les paquets de réglisse Haribo ! 30% de réduction, ça ne se rate pas. Haribo, c’est beau la vie ! » Par pur réflexe involontaire, les yeux de Jérôme se sont tournés vers les hauts parleurs pendant la courte et tonitruante annonce. Lorsque son regard revient au rayon confiserie, ce n’est plus un, mais deux bonhommes Haribo engoncés dans leurs pantalons rouges qui le fixent avec des yeux plein de malice. Finis les amuses gueules se dit Jérôme, on vient de passer au plat de résistance. La fin du monde tel que nous le connaissons.





Les deux garçons bonbons échangent un bref regard puis se retournent de concert vers Jérôme qui tient toujours le pistolet à clou tendu vers l’un d’eux. « Ca sent mauvais. » Sans réfléchir plus avant, il fait feu. Quand on tire, on raconte pas sa vie dirait Clint. Un clou vient se planter entre les deux yeux du premier Haribo dans un bruit flasque. La tête du bonhomme est projetée en arrière. La réglisse avec laquelle il tient la grosse dame transformée en croco géant se rembobine rapidement dans sa main, à la manière d’un mètre mesureur de chantier. Haribo, la tête toujours renversée en arrière recommence à hoqueter dans un rire silencieux. Son jumeau l’imite aussitôt, observant, le visage hilare, la tête rose toujours renversée de son camarade, un grand clou planté entre les deux yeux. Cet éclat de rire muet est pire que toutes les visions d’horreur, de corps mutilés, de zombies, ou de chiens de l’enfer que Jérôme s’était préparé à affronter. Devant ces deux gros enfants malsains, difformes, et plastiques qui tressautent à l’unisson avec un regard torve et un sourire mauvais aux lèvres, il se sent démuni. Pour la première fois de sa vie, il ressent la peur de la mort. Impuissance totale. Soudain, il remarque que les deux bras qui tiennent les réglisses chez les frères Haribo sont en train de s’armer. Son sang ne fait qu’un tour. Il va finir comme la grosse dame.

D’un bond sur le côté, il se place derrière la petite fille qui n’a cessé de sangloter depuis la mort de sa mère et la soulève prestement par les dessous de bras. La team Haribo envoie ses rubans de réglisse fouetter l’air en direction des deux cibles en mouvement. Jérôme se sait perdu. Dans cette position, avec la petite fille dans les bras, impossible d’esquiver à temps. Toutes ces années d’entraînements pour rien? Mourir bêtement en essayant de sauver une petite poupée Barbie? L’amertume et le désespoir l’envahissent tandis que les bouts de réglisses se rapprochent au ralenti derrière lui. Il ne peut pas mourir. Pas comme ça en tout cas. Il s’est entraîné toute sa vie pour ce moment. Il était prêt pourtant. Il est toujours prêt. « Je suis prêt bande d’enculé! » hurle-t-il en se retournant. Utilisant toutes les fibres musculaires de son corps, il fait pivoter son buste et balance la petite fille innocente en plein sur la trajectoire des rubans de réglisse. Touchée de plein fouet, celle-ci explose en criant de surprise dans un grand éclair rouge en milliers de petits bouts de gelée rose qui s’éparpillent dans les rayons alentours.


Jérôme prend la tangente sous une pluie de bonbons acidulés au bon goût d’enfant. Un sourire féroce mange la moitié de son visage. La morveuse a détourné la trajectoire des fouets en réglisse, il a toute latitude pour s’en aller. Il est né pour vivre ce genre de moments intenses. Le réveil du monstre. A présent, plus que jamais : il est prêt!





It's the end of the world baby!

lundi 26 mars 2012

Retrospectives...La flemme quoi!

     Bonjour tout le monde!

     Commençons par un constat. Quand je manque de sommeil, je suis irritable et improductif. Imaginez à présent que ça fait bientôt deux semaines que je n'arrive pas à dormir plus de X heures. Sachant que X = Y - 2, Y étant le nombre d'heures de sommeil que mon rythme biologique exige de moi. Bref, je suis très très irritable, désagréable au possible, et d'un laconisme qui frise le mutisme. Mais surtout, je suis léthargique. Et donc incapable de produire quoique ce soit.

    Mais parce que je vous aime bien, que je suis gentil, et que je suis assez imbu de ma personne pour vous fourguer des vieilleries juste histoire de vous occuper un peu, je vous propose de relire deux textes que j'aime beaucoup et que vous n'avez peut-être jamais pris le temps de lire.

Le premier parce qu'il représente tout à fait le niveau de psychopathie que j'atteindrai vers l'âge de 37 ans :
Le deuxième parce que les romans initiatiques animaliers se font trop rares ces derniers temps :



lundi 19 mars 2012

C'est quoi le bonheur?

           Tout le monde aspire au bonheur. D'une façon ou d'une autre, on a toujours besoin de plus que ce que l'on a, et on appelle ça le bonheur. C'est fabuleux parce qu'inaccessible. Chacun a sa propre vision de la chose. Moi le bonheur, ça serait gagner plein d'argent, en faisant ce que j'aime : écrire. C'est un joli rêve. On en a tous. On a tous ce petit rêve au fond de nous. On a tous un petit quelque chose en plus qu'on aimerait voir grandir. Une passion. Un espoir d'autre chose. Quelque chose qui nous fait frissonner. Ce moment où l'on arrive à jouer parfaitement cette chanson de Queens of the Stoneage à la batterie. On se dit que ça serait bien de pouvoir monter un groupe. Ce jour, au fond de l'amphi de droit commun, où l'on se rend compte que ce dessin gribouillé à la sauvette a vraiment de la gueule. On aimerait bien le montrer au plus de monde possible. Une recette préparée pendant trois heures passées à surveiller les feux et jongler avec les ingrédients. Apercevoir cette lueur dans les yeux de son invité lorsqu'il goûte la première bouchée. L'espace d'une seconde, on est un chef étoilé. Ces moments où tout semble parfaitement à sa place. Ces moments où ton coeur bat plus vite. Ces moments où tu sais qui tu es et pourquoi tu es là. Quand ton cerveau se vide et qu'un maelström d'émotions t'envahit. Le moment où tu n'es plus qu'une sensation. C'est à peu près ce que je ressens quand je suis devant mon PC et que mes doigts s'agitent sur le clavier. Une sensation de bien-être intense : c'est ça le bonheur ?

          Alors pourquoi j'ai laissé tomber le bonheur pendant si longtemps, si c'est ce que me procure l'écriture ? C'est là que les choses deviennent bizarres à vrai dire. Et c'est un peu le but de cet article. Il semblerait que je n'arrive à écrire que quand je suis malheureux, incomplet. Et il en a toujours été ainsi. Quand ma vie sentimentale était un bordel sans nom, quand la solitude et l'ennui du chômage me tuaient à petit feu, et à présent, un travail qui me donne envie de hurler à pleins poumons sur le monde entier. C'est dans ces périodes que l'inspiration arrive. Torrents de mots, idées qui affluent par centaines, le crayon n'est pas assez rapide pour tout capter sur mon cahier. Ça paraît logique vu de loin comme ça. Il est pas heureux alors il cherche le bonheur et le bonheur c'est l'écriture. Oui, c'est sûrement ça. C'est même tout à fait ça en fait. Mais alors expliquez moi la suite.
        Il y a deux ans, j'ai trouvé un travail qui me plaisait, et j'étais heureux d'y aller. Ma copine est venue emménager avec moi, et on a enfin pu commencer une vie à deux. Pendant deux ans j'ai eu beaucoup de temps libre, car des horaires beaucoup plus souples. Pendant ces deux années, j'ai été un homme épanoui. Un homme épanoui mais triste parce qu'incapable d'écrire la moindre ligne. Que des mots creux et des idées abandonnées dès la deuxième page. Ce n'est pas l'oisiveté qui ma empêché d'écrire. J'ai vraiment beaucoup essayé à cette époque. J'ai fourni beaucoup d'efforts sans abandonner. Ça n'en était que plus frustrant. Je me pose donc cette question. Pourquoi est-ce qu'il me serait interdit d'avoir le beurre et l'argent du beurre ? Etre épanoui à la fois humainement et artistiquement.

         Tout ça est un peu décousu je le reconnais. Mais pour moi le titre de cet article, c'est une réelle question piège. Ma notion du bonheur est toute relative car j'ai l'impression que quoique je fasse, une partie de moi sera dans l'ombre. Que quoi que je fasse, une part de regret m'habitera toujours. Ma recherche du bonheur serait un chemin de croix sans fin ? Dans ce cas là, à quoi me servirait-il de le chercher ? Je n'ai qu'à rester un éternel frustré. Mais ça non plus ça ne me convient pas. Je ne suis pas un poète maudit, pas plus qu'un dépressif chronique. Les gens qui me connaissent le savent bien, je suis un optimiste convaincu. Je ne fais même pas exprès, mais je sais que demain sera meilleur. Je le sais c'est tout. Alors en attendant, je vais continuer de chercher des réponses à cette question. Quand j'aurais trouvé, je vous dirais. Peut-être demain ?Après demain ? Dans dix ans ? On verra bien.

Allez, des gros bisous.

vendredi 16 mars 2012

This is the End - Episode 3.5

L’inspecteur Malterre est une personne extrêmement pragmatique. Plus qu’un trait de caractère, c’est un mode de vie. Une chose qui dicte ses actes au quotidien depuis près de 45 ans. Rien ne semble jamais l’étonner. Lorsque le téléphone sonne pour lui annoncer cette étrange affaire en cours à La Défense, il ne cille pas. Un poisson géant qui tire sur tout ce qui bouge dans les couloirs du RER A et une équipe de snipers déguisés en bonhommes Cétélem dans les immeubles du parvis. La seule chose qu’il a retenu de ce coup de fil, c’est l’impressionnant nombre de victimes et l’urgence de la situation. Sans doute l’affaire la plus grave de sa carrière. Mais là où certains se mettraient à courir en tous sens, paniqués devant l’urgence, l’inspecteur Malterre souffle sur son café brûlant puis en boit une gorgée qu’il savoure en fermant les yeux quelques secondes. Il repose son mug qu’il éloigne d’un geste lent avant de reprendre le combiné du téléphone. "Martin, met moi en contact avec le groupe d’intervention de la gendarmerie, c’est urgent." dit-il de façon posée en détachant chacun de ses mots. Il raccroche et regarde pensif le café fumer dans le cadeau de fête des pères que sa fille lui a offert l’an dernier. Il sait qu’il n’aura plus le temps d’y toucher pour le restant de la journée, peut-être même avant plusieurs jours si les choses se compliquent. Le téléphone sonne de nouveau. C’est le GIGN. Il prend une grande inspiration avant de décrocher.



"Vous avez bien compris, silence radio tant qu’on n’a pas établi de contact avec la cible." Tout le monde hoche vigoureusement la tête en signe d’assentiment. "Bon, formez les équipes on y va." Dans les tunnels vides du RER A, quatre groupes de six personnes s’organisent en silence. Le commandant Legrand fait un signe des deux mains et la troupe se met en branle au pas de course. Le trafic du RER a été arrêté, mais il y a quelque chose d’oppressant à se déplacer ainsi librement dans ces tunnels, éclairés à la seule lumière de quelques ampoules rouges et blanches éparses. Le claquement des pas et le cliquetis métallique de l’équipement résonnent. Tous les sens sont en alertes, à l’écoute du moindre bruissement suspect, à l’affut de n’importe quelle ombre fugitive. La lumière de la station se rapproche, les chefs d’équipe dialoguent avec les yeux. A l'aide de quelques gestes rapides le commandant divise les groupes. Deux équipes remontent les escaliers qui mènent au quai tandis que deux autres continuent sur les rails surveillant leurs arrières et les hauteurs. Ils balayent rapidement le niveau. RAS. La tension monte d’un cran, ils vont devoir monter. Tactiquement, la situation devient réellement compliquée, trop de surface, trop de caches. Ils vont devoir se séparer et redoubler de prudence. Une équipe par escalator. Les hommes se préparent. Selon les témoignages qu’ils ont étudiés sur le chemin, le type possède une sacrée puissance de feu et est du genre énervé. Du genre impitoyable. Le fait qu’il ressemble à une publicité n’a aucune espèce d’importance. Cet individu est dangereux et armé, si jamais ils le voyaient, il faudrait l’abattre sans hésiter. Les mains se resserrent sur les SIG-550. Du bout des doigts, chacun vérifie que la sécurité est bien ôtée. L’escalator remonte lentement les hommes dans un silence mécanique. Une transpiration acide suinte sous leurs aisselles tandis qu’ils pointent leur arme à la recherche du criminel au signalement le plus absurde de toute leur vie. L’escalator arrive en fin de course. Comme un seul homme, ils accélèrent en synchro et se répartissent en miroir de part et d’autre de l’escalier mécanique. Les respirations sont lourdes, les bouches sont sèches, mais leur concentration est sans faille. Chacun couvre l’autre et les groupes avancent à pas mesurés dans le dédale de La Défense. Trop de piliers, trop de boutiques, c’est un enfer pour les nerfs de surveiller un endroit pareil. Tellement d’embuscades possibles. Et s’ils étaient plusieurs ? Ils se feraient massacrer sans même avoir le temps d’appeler à l’aide. Trop penser ne mène à rien.



Soudain le lieutenant Rémy l’aperçoit, son cœur manque de sauter hors de sa poitrine. Il le voit. Le suspect. Croustibat, en chair et en arrêtes. Mâchoires carrées, peau jaune et luisante, petit bonnet blanc vissé sur le coin de la tête, T-shirt bleu qui ne rime à rien, biceps saillants, kalashnikov en main et sourire carnassier. Aucun doute c’est bien leur homme qui les attend tout sourire, à une dizaine de mètres, pas embusqué pour un sous. Pas d’hésitation. Il ajuste et tire dans un mouvement rapide. Une première salve d’une dizaine de balles. "Equipe Delta, je l’ai en visuel" dit-il sobrement dans son micro en balançant une deuxième salve. Le poisson jaune ne bronche pas. C’est comme si toutes les balles avaient manquées leur cible. Les hommes de son équipe essayent à leur tour. Tous les six tirent ensemble plusieurs salves sur la friture sagement immobile. Aucun projectile ne l’atteint, mais plus étrange encore, on n’entend aucun impact de balle. Ni contre lui, ni contre les murs, les piliers ou bien vitrines environnantes. C’est comme si les balles se volatilisaient à son contact. Le sourire de Croustibat s’élargit à mesure que les chargeurs se vident. Ses grands yeux noirs sont écarquillés dans une grimace démente. Des yeux d’un noir profond, sans aucune lueur de vie. Le sourire féroce d’un monstre qui s’apprête à bondir. Un gros doigt jaune s’avance vers la gâchette de la kalash. Le feu des armes cesse, ils ont compris. C’est au tour du gros poisson jaune d’essayer, et quelque chose leur dit que lui n’aura aucun souci, lui, à faire mouche. Le lieutenant Rémy plonge à couvert. Le feu de l’enfer se déchaîne dans son dos. Les balles volent en tous sens. Il a trouvé refuge derrière une de ces grandes poubelles rondes en métal sur laquelle les balles viennent ricocher en lançant des étincelles. Il se risque à jeter un coup d’œil. Trois hommes à terre, étourdis par le choc des balles sur le gilet pare-balle ou bien blessés aux membres. Il ne reste que deux valides planqués derrière un pilier et à l’angle d’une croissanterie. Ceux-là continuent d’arroser la monstrueuse pub qui avance lentement mais inexorablement dans leur direction. Le lieutenant profite que l’attention de Croustibat est focalisée sur ses camarades d’infortune pour tenter une sortie. En quelques pas ramassés il rejoint les blessés et les traine un à un derrière son abri poubelle. "Equipe delta, on a trouvé notre poisson. Besoin de renfort, trois hommes à terre." annonce-t-il dans son micro. Dans le vaste hall et dans ses écouteurs il entend des coups de feu qui résonnent et une voix essoufflée. "On a des problèmes aussi de notre côté, et je crois que les deux autres équipes ont été complètement annihilées. Il faut se replier d’urgence et …" La communication coupe brutalement. L’inspecteur avale difficilement le peu de salive qu’il lui reste. Un cri horrible lui parvient depuis la croissanterie. "Il y en a deux !" hurle un des hommes tentant de s’échapper avant de se faire littéralement coupé les jambes par le tir croisés de deux kalashs. Il s'effondre dans un hurlement déchirant. L’homme caché derrière le pilier tout près d’eux jaillit en hurlant hors de sa cachette. Il bondit sur le dos du plus proche poisson et abat à plusieurs reprises son couteau dans la face jaune. La lame pénètre et ressort sans effort, mais surtout sans séquelle. Puis dans une ultime tentative désespérée, le couteau s’enfonce droit dans le chapeau marin. Le visage rieur de Croustibat se transforme alors en un masque hideux, mélange de douleur et de rage. Une gigantesque colonne de sang noir et visqueux s’élève hors de la blessure. Un cri, comme un rugissement, comme la terre qui s'ouvre en deux emplit alors l'espace de la station. Le gendarme intrépide lâche immédiatement prise, terrifié, et se laisse tomber au sol pour prendre la fuite, mais Croustibat le furieux et son acolyte Croustibat rieur, fraîchement débarqué dans l'arène, le criblent de balles. Il s’étale au sol en glissant. Les poissons n’enlèvent pas pour autant le doigt de la gâchette et continuent de le mitrailler sans relâche, le transformant peu à peu en une masse tressautante et sanguinolente. Une bouillie d’humain. Le lieutenant Rémy n’ose plus regarder. Les deux mains crispées sur son arme, il ferme les yeux et récite nerveusement une prière. A côté de lui gisent les gendarmes inconscients. Le lieutenant Rémy sait que son heure est bientôt venue, il espère juste que ça ne sera pas trop douloureux. Il a fini sa prière et remplace le chargeur de son arme. Un dernier barouf, pour l’honneur. Maintenant, il a peut-être une chance de leur survivre, il connaît leur point faible.



Dans l’une des fourgonnettes du groupe d’intervention, un homme écoute calmement les gendarmes du GIGN se faire massacrer les uns après les autres. Il les avait mis en garde sur les risques tactiques d’une telle opération, mais personne n’avait cru bon de l’écouter. Surtout pas le commandant Legrand. Selon lui, le nombre d’hommes était suffisant pour appréhender un seul individu puis déloger les snipers de leur cachette. Maintenant, il ne peut plus admettre son erreur car il est mort. L’inspecteur Malterre vient de l’entendre pousser un râle douloureux puis quelques gargouillis sanglants avant de rendre son dernier soupir. Son pragmatisme lui a encore sauvé la vie, une fois de plus. Il avait promptement refusé de les accompagner sur le terrain. "Je suis un homme de bureau à présent leur avait-il répondu, mes réflexes sont émoussés. Je sais encore tenir une arme, mais rien de dit que je sache encore m’en servir convenablement." Ils étaient partis au combat, le méprisant intérieurement pour son manque de courage. Oui, mais il était en vie. Que faire à présent? Une chose est sûre, il ne peut plus sauver ces hommes, perdus au milieu d’un stand de tir au pigeon. L’ennemi est en nombre inconnu, et il possède des moyens inconnus. Il manque trop de données à l’inspecteur pour échafauder un plan. Et ces cris de douleurs dans ses oreilles l'empêchent de se concentrer. Il enlève ses écouteurs, incapable d'en supporter d'avantage. La radio de la fourgonnette est H.S pour une raison inconnue. Impossible de joindre le commissariat. Il a bien essayé de téléphoner pour appeler des renforts, sans succès. Le réseau est saturé. Seules les communications à courte portée de l’équipe continuent de fonctionner correctement, relayant les cris de panique et les coups de feu dans le casque audio. Il doit retourner au commissariat et alerter le préfet, voir le président. C’est l’apocalypse là-bas. Ce n’est plus du GIGN dont on a besoin, c’est de l’armée. Il met le contact et démarre la fourgonnette. L’inspecteur Malterre a subitement très envie d’un café.